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Pathologies vulvo-vaginales en pratique courante


 

Docteur Katty Ardaens
1 rue Philippe de Girard

59113 Seclin  

 

Les pathologies vulvo-vaginales représentent un motif de consultation très fréquent en gynécologie. Elles regroupent les infections génitales basses mais aussi les  troubles de l’écosystème vaginal qui à eux seuls peuvent être à l’origine d’une symptomatologie clinique.

Devant des signes fonctionnels très banaux, tels que leucorrhées, brûlures vulvo-vaginales, picotements, prurit, le clinicien doit se poser plusieurs questions :

S’agit-il de leucorrhées physiologiques ?

S’agit-il d’une authentique pathologie infectieuse, d’une IST ?

Y-a-t-il perturbation  de l’écosystème vaginal ?                                                                                                                                                    

 

L’écosystème vaginal

 

La flore vaginale est composée de 95% de lactobacilles ou bacilles de Doderlein et de 5% de germes essentiellement anaérobies : Gardnerella vaginalis et Mycoplasmes Hominis représentent l’essentiel de cette flore « annexe ». La bonne santé des lactobacilles dépend étroitement de l’imprégnation ostrogénique qui assure la production de glycogène par les cellules superficielles du vagin : ce glycogène est catabolisé par les lactobacilles en acide lactique responsable de l’acidité physiologique du vagin. Le pH vaginal se situe entre 4 et 4, 5 et exerce un effet bactériostatique propre. Les lactobacilles produisent également du peroxydase d’hydrogène qui a un effet inhibiteur sur le développement de la flore anaérobie. De plus, ces lactobacilles inhibent l’adhésion des bactéries à la paroi vaginale. Ainsi une diminution de la flore de Doderlein peut favoriser à elle seule la prolifération de germes anaérobies ou la prolifération d’autres micro-organismes.

 

Il faut donc distinguer deux catégories d’infections vaginales, les vaginites exogènes représentées essentiellement par les IST, et les vaginites endogènes secondaires le plus souvent à la défaillance de l’écosystème vaginal.

 

Y-a-t-il des arguments cliniques qui permettent d’orienter le praticien ?

 

Le seul interrogatoire est insuffisant. Tout au plus, devant l’absence de prurit, le diagnostic de mycose est peu probable et en l’absence de mal odeur, il ne s’agit sans doute pas d’une vaginose.

Le changement récent de partenaire sexuel doit évoquer la possibilité d’une IST.

Par contre, l’examen clinique peut –être très contributif :

L’inspection de la région vulvaire à la recherche d’ulcérations, unique ou multiples, très évocatrices d’herpès, plus exceptionnellement de vésicules herpétiques très fugaces, ou encore de lésions fissuraires, d’une dermite desquamative pouvant traduire une mycose ou un psoriasis. Cet examen est indispensable à l’élimination d’un lichen scléreux vulvaire, pathologie très fréquente, non exclusive de la femme âgée et très prurigène.

L’aspect macroscopique des leucorrhées peut orienter vers le diagnostic de mycose (leucorrhée grumeleuse, caillebottée) ou leucorrhée grisâtre, bulleuse,  de la vaginose.

La mesure du pH vaginal dans le cul de sac antérieur ou latéral du vagin grâce à des bandelettes spécifiques. Un pH supérieur à 5 est en faveur d’une vaginose.

Le sniff-test est caractéristique de la vaginose

Il sera parfois indispensable à la réalisation de prélèvements bactériologiques, surtout en cas de changement récent de partenaire ou dans un contexte de récidive.

 

Comment interpréter un ECBL ?

 

Ne vous précipiter pas sur la dernière ligne du compte-rendu !! Sachez, non pas lire entre les lignes, mais toutes les lignes !

importance de la desquamation cellulaire : une hyperdesquamation des cellules vaginales en placard ou en nappes est en faveur d’une hypooestrogènie locale

présence de polynucléaires : sont-ils nombreux, altérés ?

présence de germes à l’examen direct : flore de Doderlein, flore pathogène ? abondance ? plusieurs souches ou souche unique ?

présence de germes en culture

Le score de Nugent permet d’apprécier la qualité de la flore vaginale.

C’est la lecture complète de cet examen qui permettra le diagnostic : un développement polymicrobien uniquement retrouvé en culture n’est pas à l’origine de la vaginite, il s’agit alors d’un problème de flore locale. Si Candida Albicans n’est pas retrouvé à l’examen direct mais à la culture, ce n’est pas une mycose.

 

 

Les étiologies  les plus fréquentes

 

A. Les Vaginites endogènes

 

ú La mycose vulvo-vaginale

Dans sa forme aigue, la mycose se caractérise par une vulvo-vaginite prurigineuse avec leucorrhées grumeleuses et pH acide conservé, voire accentué. Son traitement repose sur l’administration locale d’un ovule antifongique associé à une crème du même ordre. Elle peut récidiver, mais le diagnostic de mycoses récidivantes impose la réalisation d’un prélèvement bactériologique pour affirmer le diagnostic et rechercher d’éventuelles infections associées. Il faut garder à l’esprit que seulement 30% des patientes se plaignant de mycoses récidivantes  sont réellement infectées. Un traitement général par Fluconazole 150 mg, une fois par mois, voire une fois par semaine, s’avère souvent indispensable à l’éradication du problème.

 

                ú La vaginose

Le diagnostic de vaginose repose sur la constatation de leucorrhées grisâtres grumeleuses, nauséabondes, avec pH supérieur à 5 et sniff test  positif. Le diagnostic positif au cabinet est simple. Elle est souvent due à un trouble de l’écosystème vaginal. Son traitement repose sur les imidazolés, métronidazole, secnidazole. En cas de récidive, une correction de la flore locale est indispensable.

 

ú Les vaginites endogènes dues à des contaminations de voisinage

Il s’agit de vaginites dues à des germes d’origine digestive ( E Coli, entérocoques, strepto, staphylo,  Protéus…) Leur caractère pathogène est affirmé devant le développement d’un seul micro-organisme et la présence de nombreux polynucléaires altérés à l’examen direct. On retrouve fréquemment une insuffisance de la flore de Doderlein, expliquant cette contamination.

 

B. les vaginites exogènes

 

Il s’agit presque toujours d’IST.

 

ú L’infection à HPV

C’est l’IST la plus fréquente, mais qui est le plus souvent asymptomatique, elle ne donne aucune vaginite ; tout au plus en cas de condylomes acuminés, elle sera responsable d’une gêne vulvaire mais il n’y a pas de réelle vulvite. Elle peut être découverte de façon fortuite à l’occasion d’une autre IST.

 

ú L’infection à Chlamydia Trachomatis

Elle est asymptomatique dans plus de 50% des cas. Elle se traduit volontiers par une cervicite ou une urétrite. Elle doit être recherchée systématiquement dans les populations à risque (jeunes femmes de moins de 25 ans ; IST concomitantes) Son diagnostic repose sur la PCR, sur prélèvement cervical, urétral, urinaire, vestibulaire, voire anal. L’infection génitale basse se traite par Azithromycine, 1 g en une seule prise.

 

ú L’Herpès génital

C’est la première cause d’ulcérations génitales récidivantes. 30% des herpès génitaux sont dus à HSV Le diagnostic de certitude repose sur la culture (rarement disponible en pratique courante) ou la mise en évidence des Ag par technique d’Immunofluorescence ou Elisa. La sérologie hors contexte de grossesse est inutile.

 

ú La vaginite à gonocoques

Son diagnostic repose sur la bactériologie, elle se traite par 500 mg de Ceftriaxone en IM ou Céfixime, 400 mg per os.

 

ú La vaginite à Trichomonas

Le diagnostic est facile à l’examen direct ; en médecine générale, le recours au prélèvement au laboratoire est nécessaire, en raison de la fragilité du parasite. Son traitement repose sur les imidazolés.

 

ú L’infection à Mycoplasmes

Son caractère pathogène reste discuté et exige une concentration supérieure à 10.4 UCC /ml. Il n’est pas certain qu’il s’agisse d’une IST. Seul, Mycoplasme Génitalium est reconnu comme tel mais sa mise en évidence reste du domaine de laboratoires spécialisés.

 

En cas d’authentiques IST, la prise en charge du partenaire est indispensable, ainsi que la réalisation systématique d’un bilan sérologique comprenant sérologie syphilitique, HIV, Ag HBS et Hépatite C.

 

C. les troubles de l‘écosystème vaginal

 

Ils seront suspectés et recherchés systématiquement dans des contextes de récidives. Le traitement fait appel soit aux œstrogènes locaux, aux prébiotiques (acidifiants) ou aux probiotiques (association de bacilles de Doderlein et d’estrogènes) en cure prolongée.

 

En conclusion, la prise en charge des vulvo-vaginites impose un examen clinique systématique : une simple inspection et le recours à de « petits trucs » simples à mettre en œuvre au cabinet du généraliste permet d’éviter dans bon nombre de cas  le recours à la paraclinique. Par contre, celle-ci est indispensable en cas de récidive ou de cas clinique peu parlant. Il faudra toujours s’inquiéter de la bonne qualité de l’environnement vaginal et y suppléer si besoin est.